Des centaines de milliers de tonnes de blé risquent d’être bloquées, pour une « durée indéterminée », après le retrait de la Russie de l’accord sur les exportations céréalières. Ce nouveau coup d’arrêt dans la chaîne d’approvisionnement relance le spectre de la famine en Afrique. Quels sont les risques réels ?
Ce 31 octobre, deux cargos chargés de céréales ont quitté l’Ukraine et emprunté le corridor maritime humanitaire à destination de la Turquie, malgré le retrait de la Russie, selon le site spécialisé Marine trafic. Douze cargos au total devaient quitter les ports ukrainiens dans la journée, et quatre autres ont déjà pris la mer, a précisé le Centre de coordination conjointe (JCC), chargé de superviser l’accord sur les exportations de céréales ukrainiennes via la mer Noire. Parmi eux, l’Ikaria Angel, un navire affrété par le Programme alimentaire mondial (PAM) et chargé de 30 000 tonnes de blé à destination de la Corne de l’Afrique. Et ce, malgré la résolution prise la veille par la Russie de bloquer le transport de ces denrées alimentaires vitales pour l’approvisionnement alimentaire mondiale.
Une résolution fustigée par Kiev, Washington et l’UE. Alors que Moscou a assuré que cette décision a été prise après une attaque de drones sur ces navires en Crimée, l’Ukraine a dénoncé « un faux prétexte » et appelé à faire pression pour que la Russie « s’engage à nouveau à respecter ses obligations » envers cet accord conclu en juillet sous égide de l’ONU et de la Turquie.
Spectre de la famine en Afrique
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a afirmé que la décision russe « ne datait en fait pas d’aujourd’hui » : « La Russie a commencé à aggraver la pénurie mondiale de nourriture en septembre, quand elle a commencé à bloquer les mouvements des navires transportant nos productions agricoles », a-t-il affirmé. « Il s’agit d’une intention transparente de la Russie de faire peser à nouveau le spectre d’une famine à grande échelle en Afrique et en Asie », a-t-il ajouté, appelant à une « réponse internationale vigoureuse ».
Selon lui, au moins 176 navires transportant plus de deux millions de tonnes de céréales étaient déjà bloqués par Moscou. Le président américain Joe Biden a jugé la décision « scandaleuse ». « Il n’y avait aucune raison pour eux de faire cela », a-t-il déclaré à la presse. Le secrétaire d’État Antony Blinken a estimé que la Russie « utilise à nouveau la nourriture comme une arme », exacerbant dans le monde « des crises humanitaires et une insécurité alimentaire déjà graves ».
JA