COP28 : Macky Sall et Ousmane Diagana plaident pour une électrification rapide de l’Afrique

Pour juguler la crise de l’énergie, l’Afrique subsaharienne a besoin de plus de 200 milliards de dollars, indiquent le président sénégalais et le vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale, à quelques heures de l’ouverture de la COP28.

Si le niveau d’électrification du Sénégal est l’un des plus élevés d’Afrique de l’Ouest avec un taux d’accès de 80%, de nombreux pays du continent font face à une véritable crise énergétique. En effet, 220 millions de personnes – soit près de la moitié de la population de la région – n’ont pas accès à l’électricité, ce qui limite leur capacité d’entreprendre ou d’accéder à des services d’éducation et de santé adéquats. Pour atteindre l’accès universel à l’électricité, le rythme d’électrification en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale doit tripler d’ici à 2030.

Le gaz naturel, énergie de transition

L’accès à une énergie abordable, fiable et durable constitue une condition essentielle pour améliorer la qualité de vie de chacun et aussi une nécessité pour transformer le continent. La bonne nouvelle, c’est la révolution amorcée dans le domaine de l’accès à l’énergie hors réseau dans nos pays. Lors de l’Appel à l’action de Dakar du 7 juillet 2022, à l’occasion de l’IDA-20 [Association internationale de développement], les dirigeants africains ont manifesté leur engagement en faveur d’un accès universel à l’énergie et ont rappelé l’importance d’une transition juste et équitable pour le continent.

Dans ce contexte, les pays africains comptent utiliser notamment leurs ressources en gaz naturel comme énergie de transition pour atteindre les objectifs d’accès universel à l’électricité à moindre coût tout en facilitant la création d’emplois.

Avec un pétrole au prix élevé, l’Afrique reste dépendante des énergies fossiles, d’autant que les subventions aux carburants ont fortement augmenté et pèsent lourdement dans le budget des États. La mauvaise qualité de la fourniture d’énergie figure en tête des préoccupations mises en avant dans l’évaluation du climat d’investissement et entrave la numérisation des économies. Le doublement, au cours des trois dernières années, des financements annuels de la Banque mondiale dans le secteur de l’énergie a permis des améliorations significatives dans les États fragiles.

Par exemple, en Centrafrique, un nouveau parc solaire de 25 mégawatts avec batterie de stockage alimentera en électricité 250 000 personnes ; il doublera ainsi la capacité de génération électrique de la RCA. La production de ce parc solaire remplacera plus de 90% de l’énergie actuellement générée par le diesel, ce qui représente une économie annuelle de 4 millions de dollars en coût de combustibles pour le gouvernement. La mise en service d’une centrale solaire de cette envergure, ainsi que de cinq mini-réseaux, outre l’électrification de plus de 600 écoles et hôpitaux, ainsi que de 50% des foyers d’ici à 2030, est source d’espoir pour d’autres pays.

Tchad, Liberia, Sierra Leone et Togo

Un autre exemple d’investissement à grande échelle dans le domaine solaire, à savoir le projet régional d’intervention urgente dans le secteur de l’énergie solaire, propose un modèle d’appel d’offres concurrentielles pour augmenter l’accès à l’électricité pour des millions de consommateurs au Tchad, au Liberia, en Sierra Leone et au Togo, en stimulant la capacité énergétique renouvelable connectée au réseau, ainsi que la transmission et les interconnexions régionales.

Atteindre un accès universel à l’électricité en Afrique subsaharienne nécessitera plus de 200 milliards de dollars de financements avec un rôle essentiel de l’investissement privé. Pour y parvenir, il est impératif de renforcer les cadres réglementaires et de développer des compagnies d’électricité financièrement solides.

Au Nigeria, la plateforme Dares (Distributed Access through Renewable Energy Scale-Up Nigeria) vise à étendre l’accès en développant les énergies renouvelables, tout en levant plus d’un milliard de dollars de financement privé pour donner accès à l’électricité à plus de 15 millions de personnes.

Le Sénégal, quant à lui, a signé en juin 2023 avec ses partenaires, notamment l’Allemagne, le Canada, la France, le Royaume-Uni et l’Union européenne, un Just Energy Transition Partnership (JETP), au titre duquel le pays s’est engagé à porter de 31% à 40% la part des énergies renouvelables dans son mix énergétique d’ici à 2030. Cela suppose une mobilisation de 2,5 milliards d’euros en financements nouveaux et additionnels sur une période initiale de trois à cinq ans.

Faire baisser les coûts, une priorité

Parmi ces projets, celui qui est relatif à l’extension de l’accès à l’énergie permet au pays d’améliorer la résilience des infrastructures publiques essentielles, telles que les écoles et les centres de santé. Il permet également de développer les petites et moyennes entreprises en les connectant au réseau, ou à des centrales solaires off-grid.

Par ailleurs, Dakar progresse dans la mobilisation des financements des secteurs public et privé pour soutenir ses objectifs d’expansion d’accès à l’énergie. Des investissements supplémentaires se concentrent à présent sur la réduction des écarts et le raccordement de tous au réseau.

Faciliter le commerce de l’énergie au niveau régional pour faire baisser les coûts et offrir un accès plus large et plus fiable constitue une priorité. À cet égard, il faut saluer le lancement réussi de l’interconnexion des réseaux électriques de quatorze des quinze pays membres de la Cedeao, une initiative comportant de nombreux avantages dans le cadre du système d’échanges d’énergie électrique ouest-africain (EEEOA). La Guinée-Bissau devrait rejoindre prochainement cette interconnexion pour en tirer les avantages en matière d’accès à une énergie régulière et fiable.

L’accès universel à une énergie abordable est essentiel pour améliorer les conditions de vie des populations africaines et faciliter le fonctionnement des services sociaux. Il est indispensable pour la transformation structurelle des économies, stimulant ainsi la compétitivité et la création d’emplois. L’utilisation appropriée de l’expertise et des ressources de la Banque mondiale dans le cadre d’une coopération élargie aux institutions bilatérales et multilatérales en collaboration étroite avec les pays de la sous-région constitue un gage pour l’électrification accélérée de notre continent – un message important à la veille de la COP28.

JA

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