Sénégal : L’issue du procès d’Ousmane Sonko diversement appréciée

Le président du parti Pastef, Ousmane Sonko, a été condamné à une peine de deux mois de prison assortie d’un sursis. Poursuivi pour diffamation contre le ministre du Tourisme, l’opposant devra verser à Mame Mbaye Niang la somme de 200 millions FCFA. L’issue de son procès a été diversement appréciée.

Le verdict tant attendu est enfin tombé, ce jeudi 30 mars 2023. Après plusieurs renvois, le procès opposant le leader de Pastef, Ousmane Sonko, au ministre Mame Mbaye Niang a connu son épilogue. A l’issue d’une audience tenue en l’absence du prévenu et après que ses conseils ont boudé la séance, le verdit est donné. Deux mois de prison assorti d’un sursis. Ousmane Sonko doit en outre verser deux cents millions de francs CFA à son protagoniste, en guise de dommages. Toutefois, le leader de Pastef conserve ses droits politiques et civiques. N’empêche, ses conseils sont très remontés.

« Le tribunal s’est fourvoyé »

Selon Me Ciré Clédor Ly, membre du pool d’avocats de Sonko, « aujourd’hui, il est manifeste que la politique a fait irruption dans le palais de justice. Et lorsque la politique entre dans le palais de justice, il appartient aux acteurs judiciaires d’être lucides. Sinon, c’est la folie. Ce matin, nous avons assisté à une véritable folie judiciaire. Un tribunal qui a perdu son droit et son latin ». La robe noire estime que « déjà le tribunal s’est fourvoyé et ne peut pas rendre une décision qui puisse ne pas violer le droit à un procès équitable ». Et d’enfoncer : « il est manifeste que si nous avons quitté la salle, nous avons été contraints de le faire ».

Pour sa part, Me Olivier Sur, avocat de Mame Mbaye Niang se dit « satisfait de cette décision de justice pour deux raisons. D’abord parce qu’il y a eu une condamnation pour diffamation. La diffamation est un délit lourd, un délit qui marque l’abus de droit, de la liberté d’opinion. Il fallait qu’il soit condamné et il a été condamné ». Comme autres source de satisfaction, Me Sur estime que « la décision est lourde, parce qu’ils ont rendu une décision judiciaire. Et le rôle du juge c’est d’apaiser les choses.

« Les juges ont mis les limites »
Me Sur reconnait toutefois que « si la sanction avait été trop lourde, eh bien, c’est la ville qui s’enflammait, peut-être le pays aussi. Il y a aussi le débat politique qui risquait de prendre un virage nouveau. Aujourd’hui, les juges ont respecté la continuité et la liberté du droit de chacun de s’exprimer, mais ils ont mis les limites. Les limites c’est l’outrage, les limites c’est la diffamation, les limites ce serait une autre fois l’injure. Les limites ont été posées. Donc, bravo à la justice, bravo à la démocratie et bravo au débat politique de pouvoir continuer avec des limites grâce à la justice.

Notons que la tension était perceptible au Sénégal, avec des heurts qui ont éclaté, la veille, entre manifestants et forces de l’ordre, dans plusieurs villes du pays. De même, la veille, Me Juan Branco, un des conseils juridiques d’Ousmane Sonko, a été refoulé à sa descente d’avion à l’aéroport de Diass. L’avocat français a été contraint d’embarquer dans un avion de la Royal Air Maroc, à destination de Paris avec escale à Casablanca.

Mes Branco et Fall écartés

De même, Maître Ousseynou Fall, un des principaux avocats d’Ousmane Sonko, a été suspendu par le bureau de l’ordre des avocats du Sénégal. Ce, « sur plainte du juge en charge du dossier, Pape Mohamed Diop, suite à des échanges lors de l’audience du 16 mars dernier », a indiqué le leader de Pastef sur sa page Twitter. Des incidents qui en avaient rajouté à la tension qui existe dans ce pays d’Afrique de l’Ouest, depuis quelques semaines.

Selon Mamadou Diop, professeur, « l’Etat a reculé. Ils savaient qu’ils risquaient de brûler le pays si le tribunal avait rendu un verdict plus sévère. D’ailleurs le verdict est sévère. Car faire payer au Président Sonko la somme de 200 millions, je trouve que c’est trop. C’est même injuste ». Arame Dieng, commerçante, estime que la sentence est trop légère. « Sonko a porté de grave accusations. Il fallait que la peine soit de la prison ferme. Cela ferait réfléchir les autres qui se plairont à porter des accusations sans fondements ».

Afrik.com

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